Salut à toi, lecteur. J’espère que tu es prêt. Aujourd’hui, je vais aborder l’une des œuvres majeures de la science-fiction, écrite par un des auteurs les plus titanesques du genre.
Fondation, de Isaac Asimov
Introduction
Je tiens à préciser avant de commencer que cet article portera sur la première trilogie du cycle de Fondation, qui comporte Fondation, Fondation et Empire et Seconde Fondation, respectivement parus en 1951, 1952 et 1953 . En France, les trois romans sont parus séparément dans la collection Folio SF de Gallimard en 2009, puis ont été réunis dans une intégrale chez le même éditeur en 2015. Les premières traductions françaises de cette première trilogie datent de 1957 et 1966, dans la collection « Présence du Futur » de l’éditeur Denoël.
Pourquoi ai-je décidé de parler des trois premiers tomes du cycle alors que j’aurais pu faire un article sur chacun d’eux ?
Très bonne question.
Pendant les vacances d’été, j’ai lu cinq tomes du cycle de Fondation, à savoir Fondation, Fondation et Empire, Seconde Fondation, Fondation Foudroyée, et Terre et Fondation. J’ai exclus les deux « préludes » de Fondation pour ne pas lire tout le cycle d’un coup. Lors de ma lecture, j’ai eu l’impression que les trois premiers romans formaient un premier ensemble (j’ai appris plus tard que ces trois romans étaient à la base huit nouvelles réunies en volume plus tard) et que les deux derniers en formaient un second, ce que montrent leurs dates de parution très éloignées. Trente ans séparent les deux ensembles, puisque le premier (constitué des trois romans dont je parle aujourd’hui) date des années 1950, tandis que les deux derniers tomes ont été publiés en 1982 et 1986.
Par conséquent, j’ai décidé de traiter du cycle de Fondation en trois articles, en respectant l’ordre de publication des livres qui constituent le cycle. Le premier, celui que vous êtes en train de lire, portera sur les trois premiers tomes qui constituent la matrice du cycle, puis un deuxième traitera de Fondation Foudroyée et de Terre et Fondation. Un troisième parlera des préludes.
Maintenant que je vous ai expliqué ma démarche, nous pouvons commencer.
Isaac Asimov est un écrivain américain de science-fiction né en 1920 et mort en 1992.
Il a laissé une œuvre monumentale derrière lui, avec des romans de science-fiction, des recueils de nouvelles, des romans policiers, mais aussi de la non-fiction, avec des ouvrages de vulgarisation scientifique et son autobiographie.
Ses œuvres majeures sont le cycle des Robots et le cycle de Fondation, et c’est de ce dernier dont je vais vous parler aujourd’hui.
Fondation se déroule 22 000 ans dans le futur, à une époque où l’Homme a conquis une grande partie de la galaxie et s’est installé dans des millions de mondes. Ces mondes sont gérés par l’Empire Galactique depuis 13 000 ans. Mais Hari Seldon, un éminent scientifique, fonde la psychohistoire, une science capable de prédire l’avenir par des calculs, et prédit la chute de l’Empire Galactique, qui sera suivie d’une période d’anarchie de 30 000 ans. Hari Seldon décide donc de créer deux Fondations, chacune à une extrémité de la galaxie, pour fonder un Nouvel Empire et réduire la période d’anarchie à 1000 ans.
Le lecteur suit donc les aventures successives de personnages appartenant à la première Fondation, qui est basée sur la planète Terminus. Ces personnages sont confrontés à des crises (le plus souvent politiques, ils doivent par exemple faire face à des états voisins ou à des crises internes) qu’ils devront résoudre, le plus souvent à travers des manœuvres politiques plutôt que par la force.
Les trois premiers tomes du cycle couvrent les 500 premières années d’existence de la Fondation.
Mon analyse portera sur l’aspect historique du cycle, mais aussi sur ses ressorts de narration. Je vais essayer d’éviter les spoilers, mais sachez toutefois que Fondation est une oeuvre qui peut tout à fait être lue même avec des spoilers.
L’Analyse
Des romans qui se déroulent comme une fresque historique
Les trois premiers romans du cycle de Fondation retracent les 500 premières années de la Fondation de Terminus, en progressant par des prolepses (des bonds en avant dans le temps) et des ellipses de plusieurs dizaines d’années, pour mieux cerner chacune des crises qui se présentent aux personnages.
Par exemple, 55 ans séparent la partie « Les Maires » de celle des « Marchands », elle-même séparée de 20 ans de la partie des « Princes Marchands ». Cette multitude de bonds dans le temps nous permettent d’observer les agissements des personnages de la Fondation, comme Salvor Hardin, Hober Mallow ou encore Bayta et Arcadia Darell, qui ont tous contribué à traverser et résoudre des crises de la Fondation en apportant toujours une solution qui va lui donner plus de pouvoir (Salvor Hardin va permettre à la Fondation de s’installer dans une partie assez hostile de la Galaxie grâce à la religion et aux négociations, Hober Mallow va utiliser l’économie et le commerce…) sur le reste de la Galaxie.
À mesure que l’on avance dans le cycle, ces personnages que le lecteur aura observé dans les moments de crise deviennent des « héros de la Fondation », des personnages historiques qui s’inscrivent dans l’Histoire de la Fondation. Les personnages qui leur succèdent évoquent l’héritage qu’ils ont laissé, l’importance qu’ils ont eu, en leur attribuant des citations par exemple (on peut retenir à cet égard le « La violence est le dernier refuge de l’incompétence » de Salvor Hardin). Les actes des personnages sont reconnus par leurs successeurs (Arcadia Darell pense que c’est sa grand-mère, Bayta, qui a vaincu le Mulet et vante ses mérites), ce qui fait d’eux des figures tutélaires de la Fondation qu’il faut égaler en grandeur.
Parce que les personnages que l’on suit à travers l’Histoire de la Fondation acquièrent une certaine grandeur. Cette grandeur leur est conférée par leurs agissements qui tirent toujours la Fondation d’une situation de crise. À travers leurs manœuvres, les personnages deviennent des acteurs de l’Histoire de la Fondation et du « Plan Seldon ». Ce sont les intrigues orchestrées par Salvor Hardin qui permettent à la Fondation de ne pas être annexée par les « Quatre Royaumes », Lathan Devers va réussir à trouver un plan pour lutter contre un Empire au bord de la chute, tandis que le Mulet va bouleverser le plan Seldon, mais je ne vous en dirai pas plus. Ces personnages sont mentionnés après leur mort par leurs successeurs qui se confrontent à eux et prennent du recul sur les décisions des membres passés de la Fondation et sur la manière dont ils façonné son Histoire.
Les trois premiers tomes du cycle de Fondation nous retracent donc l’Histoire de la Fondation de Terminus, avec un aspect de fresque historique qui nous donne à voir des personnages qui résolvent des situations de crise d’une manière qui est à chaque fois différente et qui permet à la Fondation de se renforcer et de s’étendre.
« Mais comment les personnages de Fondation font-ils pour renforcer leur emprise sur la Galaxie en résolvant des crises ? » me demanderez vous.
Et bien cela va me conduire à la deuxième partie de cette analyse, qui va traiter des ressorts de narration de Fondation.
Des intrigues pleines de psychologie
Avant de continuer cet article, il convient de donner une définition rapide de la psychologie pour ne pas se perdre. D’après le Larousse en ligne, la psychologie, c’est une « Discipline qui vise la connaissance des activités mentales et des comportements en fonction des conditions de l’environnement. », ou encore une « connaissance empirique, intuitive des sentiments, des idées, des comportements humains. ».
La psychologie étudie les comportements humains et l’environnement dans lequel ils sont produits, et c’est précisément elle qui aide les Fondateurs a construire leur plan pour sortir des situations de crise.
Dans Fondation (dans ces trois tomes en tout cas), l’action se résume bien plus à des intrigues politiques et des manipulations que des combats de vaisseaux spatiaux. Mais cela ne veut en aucun cas dire que Fondation est un cycle ennuyeux, parce que la tension est omniprésente. Chaque époque se déroule comme une sorte de partie d’échecs où le membre de la Fondation placé en focalisateur doit manœuvrer pour sortir de la crise à laquelle il doit faire face. Ainsi, Salvor Hardin va devoir longuement réfléchir pour faire face aux volontés expansionnistes des Quatre Royaumes, Lathan Devers affrontera le général Bel Riose de l’Empire Galactique… Les plans des personnages sont à chaque fois différents et s’appuient toujours sur des ressorts cohérents. La partie la plus tendue de cette première trilogie est d’après moi la partie qui met en scène le personnage du Mulet, qui est un mutant capable de manipuler les émotions des gens pour les convertir à sa cause. Ce personnage fascinant parvient à mettre en déroute le Plan Seldon, mais je ne vous en dirai pas plus. J’ajouterai simplement que le Mulet rajoute de la tension, parce qu’il menace la Fondation à la fois sur le plan guerrier et mental. Les parties où la Seconde Fondation entre en jeu rajoutent également de la tension au récit, parce qu’on ne sait rien d’elle et qu’on ne peut pas savoir qui elle est capable d’influencer. Les tensions qu’ajoutent le Mulet et la Seconde Fondation sont tangibles dans ce que les personnages perçoivent d’eux, respectivement une menace quasiment invincible et une menace indicible.
La technologie et les connaissances scientifiques jouent également un rôle important dans le cycle de Fondation, puisqu’elles permettent bien souvent aux personnages de se tirer d’un mauvais pas et de prendre l’ascendant. Par exemple, le fait que la Fondation soit la seule à savoir utiliser les centrales nucléaires lui permet de négocier avec les Quatre Royaumes et même de les dominer et le « brouilleur mental » va permettre à l’équipe du Dr Darell de faire jeu égal avec la Seconde Fondation. Ce ressort narratif permet de montrer que si la Fondation n’a que peu de ressources naturelles et très peu de connaissances en psychohistoire, elle est néanmoins excellente en sciences physiques, ce qui lui permet de dominer ses adversaires sur le plan technologique. Elle compense son infériorité par sa capacité à inventer des outils qui lui permettent de se sortir des situations de crise.
Pour clore cette partie, je dirai que les intrigues de ces trois premiers tomes de Fondation sont passionnantes, parce qu’elles prennent souvent le lecteur au dépourvu en résolvant des crises par des moyens souvent surprenants !
Le mot de la fin
Fondation est et restera sans doute à jamais l’un des plus grands classiques de la science-fiction. Ce cycle a propulsé Isaac Asimov au rang d’auteur majeur du genre, et il est facile de comprendre les raisons de son ascension quand on lit les trois premiers tomes de ce cycle, qui ont été couronnés en 1966 du prix Hugo spécial « Meilleure série de science-fiction/fantasy de tous les temps ». L’aspect historique du récit et ses ressorts narratifs, bâtis sur des manœuvres psychologiques et technologiques, font de Fondation, Fondation et Empire et Seconde Fondation des romans à lire absolument si l’on veut découvrir la science-fiction ou l’œuvre de Isaac Asimov.
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Certains se laissent effrayer par l’aspect « technologie » de la SF (« quel jargon, on n’y comprend rien ! ») et j’ai été très surprise de voir cette critique appliquée à Fondation alors que, justement, c’est le côté sciences sociales qui y est le plus fort, entre fresque historique et étude psychologie comme tu le soulignes parfaitement. Bref, tout ça pour dire à quel point je partage ton enthousiasme pour cette trilogie ! (Il faut encore que je m’attaque à la seconde intégrale^^)
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La seconde intégrale est absolument géniale, et encore meilleure que la première, à mon sens 🙂
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