Terminus, de Tom Sweterlitsch

Salutations, lecteur. Est-ce que tu aimes les voyages dans le temps ? Les univers alternatifs ? Les thrillers ? Si tu apprécies tous ces thèmes, eh bien laisse-moi te parler de

Terminus, de Tom Sweterlitsch

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Introduction

 

Avant de commencer, j’aimerais préciser que cette chronique émane d’un service de presse des éditions Albin Michel, que je remercie chaleureusement pour l’envoi du roman !

Tom Sweterlitsch est un auteur de science-fiction américain qui a commencé sa carrière en 2014 avec le roman Tomorrow and Tomorrow. Il a également travaillé avec le réalisateur Neil Blomkamp (District 9, Elysium, Chappie) à l’écriture de courts-métrages tels que Rakka, Firebase, et Zygote.

Le roman The Gone Wolrd, paru en VO en 2018, a été traduit en français sous le titre Terminus par Michel Pagel (qui est également auteur de SFFF) et a été publié dans la collection Imaginaire d’Albin Michel. Il sera prochainement adapté au cinéma par Neil Blomkamp.

Voici la quatrième de couverture du roman :

« Depuis le début des années 80, un programme ultrasecret de la marine américaine explore de multiples futurs potentiels. Lors de ces explorations, ses agents temporels ont situé le Terminus, la destruction de toute vie sur terre, au XXVIIe siècle.

En 1997, l’agent spécial Shannon Moss du NCIS reçoit au milieu de la nuit un appel du FBI : on la demande sur une scène de crime. Un homme aurait massacré sa famille avant de s’enfuir. Seule la fille aînée, Marian, 17 ans, serait vivante, mais reste portée disparue. Pourquoi contacter Moss?

Parce que le suspect, Patrick Mursult, a comme elle contemplé le Terminus… dont la date s’est brusquement rapprochée de plusieurs siècles. »

Mon analyse traitera entre autres, du mélange entre SF et thriller, de la manière dont les voyages dans le temps influent sur l’enquête, et enfin, je m’arrêterai sur les personnages. Je vais également m’efforcer de ne rien spoiler, pour que vous puissiez profiter du roman sans connaître certains dévoilements majeurs de l’intrigue.

 

L’Analyse

 

SF + Thriller

 

Terminus mêle thriller et science-fiction à travers son intrigue et ce qui fait sa tension. Je m’explique. Le fond science-fictif se présente à travers les personnages du NCS, dont Shannon Moss, le personnage principal fait partie, qui voyagent dans le Temps et l’Espace profond pour explorer les confins du cosmos, mais également les TFI (Trajectoire Future Inadmissible), qui sont des futurs alternatifs qui varient en fonction du présent, appelé « terme ferme » (j’y reviendrai). L’observation des futurs lointains par l’Humanité lui a permis d’observer le Terminus, qui est la fin de toute forme de vie sur Terre, et donc de l’Humanité. L’un des objectifs du NCS est donc de comprendre ce qu’est le Terminus, les raisons de son apparition, et de l’empêcher d’advenir. L’aspect thriller du roman de Tom Sweterlitsch intervient sous la forme de l’enquête policière menée par Shannon Moss à propos du meurtre de Patrick Mursult, un membre du NCS, et de l’avancée inexorable de la date du Terminus, qui se rapproche de plus en plus, créant ainsi une tension narrative qui monte crescendo et crée un climat apocalyptique ainsi qu’une atmosphère d’urgence. Cette tension vis-à-vis du Terminus, de son approche, et de la mort de Patrick Mursult, débouche sur des scènes horrifiques, puisqu’on découvre des scènes de crimes souvent atroces (j’y reviendrai), et quels effets peuvent avoir la découverte du Terminus sur les personnes qui l’observent. Ainsi, le Terminus peut rendre fous ou infirmes ceux qui l’observent, parce que leur compréhension est totalement dépassée face aux phénomènes qu’il engendre, tels que des crucifixions de personnes à l’envers ou d’autres qui courent jusqu’à se noyer dans un océan ou mourir, par exemple. On observe également que les membres du programme Eaux Profondes, qui voyagent donc dans l’Espace et le Temps profond, sont parfois traumatisés par ce qu’ils vivent. Les TFI peuvent ainsi perturber la perception de ceux qui s’y rendent, parce que les événements qui s’y sont produits et qui s’y produiront n’arriveront peut-être jamais en « terre ferme », et l’exploration de l’Espace profond montre des marins qui peuvent être « terrassés » par l’immensité du cosmos et l’insignifiance humaine au sein de celui-ci. Voilà un propos que ne renierait pas H. P. Lovecraft et son cosmicisme. On peut également voir une certaine ironie dans le fait que l’Humanité soit terrassée par l’urgence du Terminus, parce que c’est l’avancée des sciences qui a permis aux Hommes de voyager dans le temps et dans l’espace qui leur a fait observer leur propre fin.

Le roman de Tom Sweterlitsch met donc en scène un programme secret de l’armée américaine qui permet d’aller explorer le temps et l’espace, pour découvrir des planètes lointaines ou des futurs possibles. Ainsi, les TFI peuvent énormément varier, certaines technologies peuvent y avoir été découvertes, mais pas d’autres (dans l’une d’entre elles, le cancer a été guéri, tandis que dans une autre, des systèmes « d’Ambiance » avec des hologrammes sont présents partout dans la société…), certains événements historiques peuvent s’y être déroulés ou non, tels que des attentats, par exemple. Des références à des événements historiques réels sont également faites, avec les attentats du 11 Septembre ou encore les attentats au gaz sarin dans le métro de Tokyo par la secte Aum Shinrikyō. Shannon Moss va devoir enquêter dans des TFI afin de trouver des informations sur la mort de Patrick Mursult, en explorant des futurs où l’affaire aurait avancé et dans lesquels des événements importants en rapport avec celle-ci se seraient produits, avec toutefois le risque de mourir, d’être capturée par des personnes qui savent ce que sont les TFI et qui ne veulent pas disparaître après le départ de Moss, puisque si le présent est le point d’ancrage du réel, la TFI, qui n’est qu’une variation possible de ce présent, disparaît lorsque l’agent le quitte, ou encore que les informations qu’elle y recueille se révèlent inutiles à l’enquête dans le présent, parce que des événements peuvent ne jamais se produire.

Les voyages dans les TFI sont ainsi marqués par une forme de tragique, parce que ceux qui les entreprennent vieillissent plus vite que la normale, puisque le temps qu’ils passent dans les TFI fait vieillir leur corps de la même façon qu’en terre ferme, ce qui fait que Moss est biologiquement aussi âgée que sa mère, mais aussi parce qu’ils peuvent devenir des « papillons sous cloche », capturés par des personnes conscientes d’être dans une TFI qui ne veulent pas disparaître lorsque le voyageur retourne en « terre ferme ». Les marins du NCS sont donc souvent éprouvés mentalement et physiquement par leurs voyages, et n’ont même pas l’assurance que leur voyage et les informations qu’ils en rapportent puissent se révéler utiles.

Sans vous en dire plus sous peine de spoiler lourdement, les personnages antagonistes sont également marqués par la tragédie du voyage temporel, mais à encore plus haut niveau selon moi.

Cette tonalité tragique et le sentiment d’urgence dégagé par l’approche inexorable du Terminus donnent au récit un ton parfois très noir, qui est encore renforcé par les descriptions des cadavres, marquées par un souci des détails macabres et un côté gore, et l’état d’esprit littéralement sordide de certains personnages (antagonistes ou non, d’ailleurs), qui cherchent à construire le Naglfar, le navire constitué d’ongles de L’Edda de Snorri Sturluson avec… des ongles qu’ils retirent des corps de leurs victimes. La noirceur du ton est également soulevée avec le fait que le récit n’épargne absolument rien à Moss ou aux autres personnages, avec des morts violentes, des passages qui détaillent ce qu’ont vécu telle ou telle personne dont on découvre le corps rongé par des armes chimiques, mais aussi des confrontations avec des « échos », c’est-à-dire des personnes venues d’une TFI qui se retrouvent dans le présent, ce qui crée des scènes marquées par la violence, à la fois physique et psychologique. Enfin, la tonalité sombre de Terminus réside également dans une ironie parfois très cruelle, parce qu’on observe que certains détails anodins observés dans les descriptions prennent toute leur utilité par la suite et révèlent la culpabilité de certains personnages, qui étaient parvenus à la cacher dans le présent ou dans les TFI. Tom Sweterlitsch ne laisse donc rien au hasard et dévoile peu à peu les connexions entre certains personnages qui paraissaient ne pas l’être de prime abord. L’utilisation des voyages dans le temps et des échos apporte donc un véritable souffle au cadre de l’enquête sur le meurtre de Patrick Mursult, en plus de mettre en évidence la manière dont certains événements et personnages sont liés ou vont être liés à travers des descriptions très soucieuses des détails qu’elles donnent. On peut également ajouter que les variations des TFI que Shannon Moss visite permettent d’observer les conséquences (positives ou non) des avancées de l’enquête, ainsi que les éventuels problèmes qu’elles ont engendrés.

Je terminerai sur la profondeur des personnages, notamment Shannon Moss, qui est ballotée entre la terre ferme et les TFI, qui compare les actions effectuées par certaines de ses connaissances dans le présent et celles qu’ils font dans le futur, ce qui la force à faire la part des choses, parce que tel personnage ne l’a pas (encore) trahie, tel autre n’a pas tenté de la tuer, ou vécu d’abominable tragédie… Moss doit donc garder la tête froide et ancrée dans le présent, malgré le fait qu’elle ait connaissance de ce que certains membres de son entourage pourraient devenir, ou sont devenus dans d’autres futurs. L’auteur montre que les personnages peuvent profondément changer en fonction des événements qu’ils ont du (ou non) traverser et peuvent presque devenir complètement autres, même s’ils gardent le même fond, ce qu’on observe chez Nestor ou Brock, des membres du FBI que Moss rencontre à la fois en terre ferme et dans des TFI. Elle apparaît également, et à plus d’un titre, comme le pivot essentiel de la narration et de son ironie, puisqu’elle est la seule à « tout » savoir et à pouvoir agir, malgré l’urgence et l’horreur des situations auxquelles elle doit faire face et de leur impact parfois énorme sur son psychisme, d’autant plus quand on connaît son passé, que l’auteur s’emploie à détailler parce qu’il a également son importance (je ne peux malheureusement pas vous en dire plus !).

 

Le mot de la fin

 

Terminus mêle science-fiction et thriller avec brio en mettant en scène une enquête policière qui se déroule dans un climat de tension, qui voit la fin du monde, le Terminus, se rapprocher inexorablement pour signer la fin de l’Humanité. Tom Sweterlitsch donne une tonalité très sombre à son récit, avec des descriptions de corps et des scènes d’action souvent marquées par le macabre et le sanglant, mais il montre également un souci du détail assez marqué dans la construction de ces personnages, principaux comme secondaires, ainsi que dans la progression de l’enquête, qui avance à mesure que Shannon Moss explore les futurs alternatifs et relie des faits et des personnages a priori non liés entre eux.

Vous pouvez également consulter les chroniques d’Apophis et Gromovar sur la VO, et pour la VF celles de Célindanaé, Lutin, Touchez mon blog, Monseigneur, Cunéipage, FeydRautha, Brize, Yogo, Anudar, Xapur, Le Chien critique, Lune, Mélie, Dionysos, La Geekosophe, Just A Word, Baroona, Jeff, Lhibsei

31 commentaires sur “Terminus, de Tom Sweterlitsch

    1. Ne le prends surtout pas mal, ce genre de liens ne sont pas là pour dénigrer qui que ce soit 🙂 ! Il s’agit juste de donner la possibilité au lecteur de l’article de lire d’autres chroniques à propos des romans dont je parle.
      Si jamais ce commentaire te gêne, je peux tout à fait le supprimer 🙂 .

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