Interview de Zariel

Salutations, lecteur. Aujourd’hui, j’ai l’immense plaisir de te proposer une interview de Zariel, graphiste et directeur artistique pour les éditions ActuSF, et auteur de Zombie, mort et vivant, publié aux éditions ActuSF !

Vous pouvez retrouver toutes les autres interviews du blog dans la catégorie dédiée du menu, ou grâce au tag Interview.

Je remercie chaleureusement Zariel d’avoir accepté de répondre à mes questions, et sur ce, je lui laisse la parole !

Interview de Zariel


Marc : Pouvez-vous vous présenter pour les lecteurs qui ne vous connaîtraient pas ?

Zariel : Je suis Zariel, graphiste illustrateur indépendant, je travaille et vis à Paris. Je suis directeur artistique pour les éditions Actusf, j’illustre en grande partie leurs couvertures et nous réalisons la maquette intérieure des livres avec ma collaboratrice. Je travaille aussi avec les éditions The Freaky42, qui est un éditeur de jeux et je m’occupe de différentes marques où je réalise des pubs et des éléments de communication.


Marc : Avez-vous toujours voulu devenir graphiste et illustrateur ? Pourquoi vous êtes-vous dirigé vers les genres de l’imaginaire ?

Zariel : Alors non, parce que je crois que quand j’étais petit je ne connaissais même pas ces mots là… À la base, je voulais être menuisier, puis en 4e mon prof à rigolé quand je lui ai dit. J’ai donc pensé que c’était mal, alors je me suis dirigé vers la vulcanologie. Ça n’a pas duré longtemps. Ensuite j’ai voulu être chercheur en histoire écossaise puis en physique nucléaire et pour finir styliste. Mais j’ai surtout voulu quitter l’école le plus vite possible. Comme je dessinais ma mère m’a inscrit dans un CFA en communication graphique à 16 ans. Et badaboum me voilà. Après pour l’imaginaire ça reste un milieu très gourmand en images contrairement aux autres genres littéraires et ça correspondait plus à mon univers.


Marc : Avez-vous suivi une formation artistique en école ? Quel est votre parcours ?

Zariel : Un jour ma mère m’a acheté des crayons de couleurs et voilà c’était foutu. J’ai suivi des cours en alternance depuis l’âge de 16 ans, qui m’ont fait découvrir le milieu du livre, de l’imprimerie et de l’édition. J’ai aussi eu deux profs qui m’ont donné le goût de l’art et de la recherche artistique. Un prof de dessin qui m’a appris les bases et encouragé à continuer et un prof d’histoire de l’art qui m’a appris à regarder une image, ça m’a beaucoup aidé.


Marc : Vous avez réalisé des illustrations de couverture pour les éditions ActuSF. Comment s’est déroulé votre premier contact avec cette maison d’édition ? Est-ce que c’est l’équipe d’ActuSF qui vous a sollicité ?

Zariel : Au départ, je travaillais régulièrement avec les éditions Griffes d’encre que j’avais rencontrées par le biais d’une amie qui était de la famille d’une des fondatrices. Elles m’ont emmené faire le tour des salons de l’imaginaire (Utopiales, Imaginales, divers salons du livre communaux.) et c’est pendant ces salons que j’ai rencontré l’équipe d’Actusf. Eric Holstein a regardé mon travail et m’a confié la réalisation de ma première couverture chez eux. Il y a près de 10 ans maintenant, c’était Le Dernier chant d’Orphée de Silverberg.


Marc : Comment se déroule la réalisation des couvertures dont vous avez la charge ? Devez-vous suivre une ligne directrice ou une charte graphique particulière, ou est-ce qu’on vous donne carte blanche ?

Zariel : Cela dépend des collections, généralement il faut respecter la position d’éléments fixes, tels que les logos, le titre et le nom de l’auteur. Certaines collections sont très « chartées » où tous les éléments sont déjà placés. Et il y a des collections où je vais avoir plus de libertés.


Marc : Lorsque vous réalisez des illustrations de couvertures, êtes-vous en contact avec les auteurs ? Vous font-ils des suggestions ?

Zariel : Alors j’essaie d’accorder les volontés du directeur, de l’éditeur et de l’auteur. J’ai différentes discutions avec chacun des interlocuteurs, quand c’est possible, que ce soit pour des questions plus ou moins commerciales avec le directeur. Avec l’auteur et l’éditeur on discute du texte, des personnages, des éléments importants dans l’histoire, et on essaie de trouver un terrain d’entente graphique avec tout ce petit monde pour correspondre au genre et à l‘époque du récit.


Marc : Quel est le projet ou l’illustration dont vous êtes le plus fier ?

Zariel : Le Fantastique Tarot Halluciné du Dr Zariel chez Freaky 42. C’est mon dernier projet en date et le Leporello bien sûr. Je pense que je pourrais plus les voir dans quelques mois mais pour l’instant je suis assez content de ces deux objets.


Marc : Comment avez-vous eu l’idée de Zombies, mort et vivant ? Pourquoi avoir choisi le genre de l’invasion zombie ? Quel est votre rapport à la figure du zombie ?

Zariel : Pour être un peu plus précis, c’est pas tout à fait une invasion. Ce sont deux visons du même sujet, la société, sous un spectre différent. Un sorte d’analogie entre le vivant et la consommation.

Ensuite je ne peux pas parler d’invasion, car on ne sait pas vraiment si c’est vrai ou s’il s’agit d’une sorte de réflexion imagée et fantasmée.

C’est aussi un exercice sur le comportement humain et les problèmes de consommation de notre société. On a observé pendant le confinement, toutes ces personnes qui ont eu une consommation excessive de pâtes et de papier toilette et qui ont retiré tout l’argent de leurs comptes en banque. On était dans une « Apocalypse » bas de gamme qui était créée non pas par le virus mais par la peur de manquer, alors que toutes les informations précisaient bien qu’il n’y avait pas de pénurie.

Donc je regardais les gens par ma fenêtre et je me rappelais les choses de la vie quotidienne d’avant le confinement et j’entendais à la radio parler de « la vie d’après », que ça allait changer en mieux… mais je vois que, en bas, les gens sont en train de s’étriper à la poste, pour avoir leur colis Amazon en premier…

Exactement comme dans Zombie (1978) de Romero, l’humanité est infectée par un virus et les gens pensent d’abord à consommer.


Marc : Certains de vos personnages semblent provenir du métro de Paris. Pourquoi ?

Zariel : Du métro Parisien, mais surtout des personnes qui vont travailler. Je suis parisien et c’est le transport que j’utilise.

Les gens dans le métro sont fascinants, je ne saurais pas dire pourquoi : ils sont là et pas vraiment présents. Ils sont en transit d’un point A à un point B. La plupart du temps il ne se passe absolument rien. Alors je les dessine.

Et pour information, ce sont de vrais croquis de métro, je ne les ai pas redessinés à posteriori. La frise de 2,80m existe réellement, ce n’est pas un montage sur ordinateur.


Marc : L’objet-livre Zombie, mort et vivant est un leporello, c’est-à-dire un livre-accordéon. Pourquoi avoir choisi ce format ? Est-ce qu’il s’agit d’un format difficile à réaliser ? Pourquoi avoir réalisé une double fresque ?

Zariel : Un jour j’ai acheté un carnet de croquis dans ce format. Dessus j’ai commencé à faire ce que je fais d’habitude, croquer les gens dans les lieux publics. Puis je me suis aperçu que ça racontait une histoire tout seul. Le fait que l’on puisse l’ouvrir de la taille que l’on veux permet de faire son propre scénario. Ce n’est pas normé par le « page par page » comme pour une BD classique. Il y a une liberté pour moi et une liberté pour le lecteur.trice/spectateur.trice.


Marc : Il est imprimé en quadrichromie. Pourquoi ?

Zariel : À la base les deux frises sont en noir et blanc, avec l’éditeur, on s’est dit que ça pouvait rajouter un niveau supplémentaire de lecture avec de la couleur.
J’ai donc décidé de coloriser mes dessins de façon « classique », les incarnats, les habits, le mobilier urbain… enfin comme une vraie BD en quadri. Mais je n’ai pas aimé et je suis revenu sur une palette plus restreinte… Ketchup mayo… !
Je tiens à préciser que le Leporello est fait en France, imprimé à Rennes et monté dans le 77 (à Soisson) et que ce genre d’objet a un coût assez conséquent. On a eu la chance de trouver un imprimeur (Média Graphic) pour nous suivre et nous trouver des solutions pour cet ouvrage.


Marc : La phrase « Rien n’a changé » rythme le récit, et s’articule à une critique de notre société. Pourquoi ? Est-ce que d’après vous, l’être humain est déjà un zombie ?

Zariel : « Rien n’a changé » est une réponse au terme que j’entendais régulièrement à la radio pendant le confinement : « La vie d’après ». Tout en constatant (comme expliqué plus haut) que les gens, même pendant le confinement ne changeaient pas vraiment et que ce que l’on vivait était tout sauf un électrochoc. 

Est-ce que l’être humain est un zombie ? Bonne question, qu’est-ce que la définition d’un zombie… Si c’est un être qui est en état de décomposition et qui cherche à consommer sans raisons… on a quand même quelques petits points communs.

Comme l’exprime Jim Jarmusch dans « Only Lovers Left Alive ». Adam, un des protagonistes, nomme les humains « Zombies ». Parce que lui, immortel, voit juste des corps se décomposer lentement et que c’est inévitable, ils vont mourir. Donc ce sont des morts-vivants.


Marc : Pourquoi décrire cette invasion du point de vue d’un personnage qui semble misanthrope ?

Zariel : Parce que sa misanthropie lui a permis de rester vivant jusque là… hi hi.


Marc : Diriez-vous que Zombies, mort et vivant est un roman graphique ? Pourquoi ?

Zariel : Non je ne pense pas. Un roman graphique se fabrique comme un roman. C’est beaucoup plus long et il y a des découpages et des parties. (Chapitre ou recueil).

Après c’est une étiquette, mais si je devais cataloguer Zombies ce serait plus un livre d’artiste ou un objet-livre.


Marc : Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Zariel : Avec ActuSF, on prépare la monographie sur Ursula K. Le Guin, De l’autre côté des mots qui va paraitre normalement en Juin si je ne me trompe pas. Un graphic « La fille aux mains magique » de Nnedi Okorafor que je vais illustrer pour Mai. Et peut-être un nouveau Leporello pour la fin d’année.

J’ai ensuite plusieurs projets de jeux avec The Freaky42, je ne peux pas trop vous en parler pour l’instant mais ils devraient sortir en Mai/juin et en Octobre, si tout se déroule normalement.

Hum… et d’autres trucs dont je ne peux pas parler parce que ce n’est pas totalement terminé et/ou concrétisé. Qui sera plus pour les médium cinéma et série.

4 commentaires sur “Interview de Zariel

  1. Vraiment intéressant, on voit bien dans les premières pages, le style croqueur dans le métro et c’est bien qu’il ait mis les croquis sur le vif sans retouches, c’est les meilleurs dessins cela, en plus que tout est de fabrication locale, bravo, on va regarder la fin d’année du coup, s’il prévoit de ressortir un Leporello, je préfère c’est plus facile à ranger qu’une BD !
    Je confirme que dessiner les gens, la vie sur le motif c’est fascinant.
    merci

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire