Sénéchal de Grégory Da Rosa

Salut à toi, lecteur. As-tu envie de découvrir un auteur qui vient de se lancer ? Un cycle de Fantasy marqué par de la réflexion et une certaine tension ?

Alors laisse moi te parler de…

Sénéchal, de Grégory Da Rosa

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Introduction

 

Grégory Da Rosa est un auteur français né en 1989, qui est passionné par l’histoire médiévale, les romans historiques, Game of Thrones et l’œuvre de Jean-Philippe Jaworski (un auteur sur lequel il faudra décidément que je m’attarde, mais qui m’a déjà donné une claque très vigoureuse avec Même pas mort dont je parle ici). Sénéchal est son premier roman, paru en Février 2017 chez Mnémos. Le roman est le premier tome d’une trilogie, dont le deuxième tome est paru en Octobre 2017 chez le même éditeur. Le roman sera également prochaine disponible en Mai 2019.

Je vous donne sans plus tarder la quatrième de couverture du roman, que vous pouvez retrouver sur le site de l’éditeur :

« Sénéchal, la ville est assiégée ! »

Telle est la phrase que l’on m’a jetée sur le coin de la goule. Depuis, tout part à vau-l’eau. Oui, tout, alors que ce siège pourrait se dérouler selon les lois de la guerre, selon la noblesse de nos rangs, selon la piété de nos âmes. Nenni.

Lysimaque, la Ville aux Fleurs, fière capitale du royaume de Méronne, est encerclée et menacée par une mystérieuse armée. Et pour le sénéchal Philippe Gardeval, ce n’est que le début des ennuis. Suite à l’empoisonnement d’un dignitaire de la cité, il découvre que l’ennemi est déjà infiltré au sein de la cour, dans leurs propres rangs ! Sous quels traits se cache le félon ? Parmi les puissants, les ambitieux et les adversaires politiques ne manquent pas ; le sénéchal devra alors faire preuve d’ingéniosité pour défendre la ville et sa vie dans ce contexte étouffant d’intrigues de palais.

Le lecteur suit donc les pérégrinations du Sénéchal Gardeval qui doit trouver des moyens de débusquer les traîtres, mais aussi des éléments qui peuvent lui permettre de dissiper les soupçons qui pèsent sur lui.

Avant de commencer l’analyse, je préfère vous dire que d’une part, j’ai reçu le roman dans le cadre du Mois de Grégory Da Rosa organisé par Bookenstock, que je remercie chaleureusement au passage, et d’autre part, j’ai adoré Sénéchal !

Ceci étant dit, je vais m’atteler à vous expliquer de manière détaillée ce qui m’a plu dans le roman. Je vais commencer par m’atteler aux côtés réalistes du roman, pour ensuite vous parler de ses originalités. Je m’arrêterai enfin sur l’axe « réflexion » de Sénéchal. Je tiens toutefois à vous préciser deux choses (oui, encore). Premièrement, vous pouvez lire cette critique sans crainte, elle ne contient aucun spoil. Et deuxièmement, je rappelle que bien que j’essaie d’aller plus loin que la simple subjectivité du « j’ai aimé/ je n’ai pas aimé » avec des éléments d’analyse, il s’agit avant tout d’une critique assez subjective dans laquelle j’essaie de vous expliquer pour quelles raisons une œuvre me plaît, ou pour quelles raisons elle me plaît moins.

Ceci étant dit, nous pouvons commencer !

 

L’Analyse

 

Un récit réaliste ?

 

Autant vous le dire tout de suite, Sénéchal n’est pas un roman réaliste à proprement parler. Il donne une très forte impression de réaliste grâce à divers effets qui permettent de situer le roman dans un cadre médiéval très fort et très identifiable.

Ce cadre médiéval nous est donné à voir grâce à un effet de couleur locale. La couleur locale permet à un auteur, par le biais de divers procédés (langage, vêtements des personnages, structures sociales, architecture), de représenter une société de manière crédible avec ses codes, son langage, ses coutumes… qu’elle soit réelle ou non. Par exemple, Jack Vance rend les mondes que visite Kirth Gersen dans La Geste des Princes-Démons crédibles grâce aux descriptions détaillées qu’il en fait, ce qui donne un effet de couleur locale. Dans le cas de Sénéchal, la couleur locale est rendue médiévale au moyen de divers procédés.

Tout d’abord, Grégory Da Rosa utilise dans son roman beaucoup de mots désuets qui datent de l’époque du Moyen-âge, tels que « braies » ou « dîmer », mais aussi des termes dans une orthographe ancienne, tels que « goule » pour gueule (pour la petite anecdote, j’ai cru à une faute de frappe dans la quatrième de couverture la première fois que je l’ai lue) ou encore « harnois » pour harnais, ce qui ancre le texte dans un univers moyenâgeux. La langue orale des personnages reflète également cette tendance. Même les unités de mesure, avec les « pieds » et les « toises », sont calquées sur celles du Moyen-âge, ce qui accentue encore cet effet.

Cette couleur locale médiévale est aussi dépeinte à travers les différentes couches de la société représentées par l’auteur, avec une aristocratie et des « gueux » plus ou moins riches qui sont séparés et bien distincts les uns et des autres. Par exemple, un « gueux », même riche, a très peu de chances de devenir un chevalier, à moins d’être anobli. Cette problématique est illustrée par le personnage du Sénéchal Gardeval, qui malgré son statut de conseiller du roi, souffre de sa position sociale, parce qu’il est perçu comme un « gueux » par un grand nombre de nobles de la cour du roi Édouard.

Enfin, l’effet de couleur locale nous est également transmis grâce au narrateur choisi par l’auteur, c’est-à-dire le Sénéchal Gardeval, qui connaît parfaitement l’environnement dans lequel il évolue de par son âge et son expérience de la politique et de l’environnement de Lysimaque.

Mais en plus de nous proposer un récit ancré dans une période médiévale, le récit de Grégory Da Rosa possède certaines touches d’originalité.

 

L’originalité du roman

 

L’une des touches d’originalité de Sénéchal, c’est la religion du Syncral, que l’auteur donne beaucoup à voir au lecteur en détaillant la manière dont ses croyants se signent, ses symboles… elle permet également de donner une cosmogonie (un récit de la création du monde) à l’univers du roman, que j’ai trouvé très original et intéressant. La Terre, l’Enfer et le Paradis qui semblent être des planètes complètement différentes et qui finissent par former un tout à partir des morceaux des unes et des autres, ça m’a assez bluffé ! Cette cosmogonie semble également justifier la présence des « Anges » et des « démons » dans le monde de Sénéchal, ainsi que l’existence d’autres races que la race humaine, avec les « Nains », les « Varaks », les « Malsang »… qui ont été nommées mais dont les représentants n’ont pas été aperçus au cours de ce tome 1 (le lecteur les croisera sûrement par la suite).

Personnellement, j’ai également trouvé la magie du roman assez originale, puisque deux magies semblent cohabiter, une magie religieuse, celle du Syncral, et une magie plus laïque, employée par Gilmenas par exemple. Les différences de ces deux magies se constatent lors de leurs utilisations respectives (notamment pendant la scène se déroulant dans une église que je ne vous spoilerai pas, mais qui est assez incroyable). La magie religieuse se base sur des chants, des « cantiques », tandis que celle de Gilmenas repose sur des « axiomes ».

Un autre aspect de l’originalité de Sénéchal repose sur la partie que je vais dès à présent aborder, son aspect d’œuvre davantage orientée sur la réflexion et l’enquête plutôt sur le combat et les quêtes que l’on a l’habitude de voir en Fantasy.

 

Un aspect réflexif

 

Je sais que de nombreuses œuvres de Fantasy abordent les thèmes de la politique et des complots au lieu de nous présenter des histoires de quêtes, de prophéties et de combats épiques, mais d’une part, je n’en ai pas lu beaucoup et ensuite, celles que j’ai lu combinent d’une certaine manière politique et prophétie (L’assassin royal de Robin Hobb ou Le Chant des Épines d’Adrien Tomas, par exemple). Par conséquent, un roman de Fantasy qui privilégie d’abord l’enquête et la réflexion par rapport au reste est quelque chose que j’ai rarement vu au cours de mes lectures.

Cet aspect réflexif trouve sa justification dans l’intrigue. Des traîtres au royaume de Méronne se cachent dans Lysimaque et le Sénéchal Gardeval doit les démasquer en enquêtant de manière plus ou moins subtile pour éviter de faire peser les soupçons sur lui, tout en suivant les pistes qui s’offrent à lui pour déterminer qui est loyal au roi Édouard ou non. Les dialogues ont donc tendance à se transformer en véritables joutes verbales, entre le Sénéchal et le baron de Ligias notamment, où chaque personnage avance des arguments qui justifient ses soupçons sur la loyauté des autres. Les accusés doivent alors prouver leur innocence grâce à d’autres arguments et des véritables preuves qui leur permettent de se disculper. Le type de narration adopté, avec un narrateur autodiégétique (c’est-à-dire un narrateur qui raconte sa propre histoire) permet à l’auteur de faire planer le doute sur chacun des personnages qui ne sont pas le Sénéchal, puisque le lecteur ne dispose que de son point de vue pour se faire une idée de la loyauté des autres personnages du récit.

Un point de vue qui est plein de préjugés et d’idées qui peuvent se révéler fausses, puisque le Sénéchal n’est pas omniscient, mais qui permet une grande proximité avec le lecteur, puisque Philippe Gardeval s’adresse fréquemment à nous, puisque le roman est en quelque sorte son « journal intime ». Intime, parce que le Sénéchal se livre à nous « plus encore qu’une femme offrant sa virginité à l’homme qu’elle aime, et mon encre imbibe les pages comme le premier sang se répand sur le drap », ce qui signifie qu’il confie au lecteur ses sentiments et ses pensées les plus profondes et les plus secrètes, comme par exemple ses rêves d’anoblissement ou son mystérieux passé partagé avec « Pénélope », la défunte épouse du roi Édouard.

Finalement, le Sénéchal Gardeval n’apparaît pas comme un héros ou un élu, mais le fait qu’il se livre au lecteur sans aucune concession et sa loyauté envers son roi lui donnent un aspect très attachant.

 

Le mot de la fin

 

J’ai énormément aimé Sénéchal. Le roman de Grégory Da Rosa est marqué par une touche médiévale qui n’est pas déplaisante du tout et surtout, par un personnage principal attachant et une intrigue assez tendue qui met son lecteur en haleine !

Je remercie donc encore une fois Bookenstock de m’avoir envoyé le roman, et Grégory Da Rosa pour ce superbe moment de lecture !

J’ai également chroniqué les excellents tomes suivants de la série, Sénéchal II et Sénéchal III.

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10 commentaires sur “Sénéchal de Grégory Da Rosa

  1. Je vais attendre le tome 3, car je lis trop de critiques divergentes, justement au sujet de cette écriture médiévale. Si la trilogie se termine sur une bonne notre, je me laisserais tentée.
    Merci pour cette superbe chronique.

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