La Maison des mages, d’Adrien Tomas

Salutations, lecteur. Après t’avoir parlé du Chant des épines et de La Geste du Sixième Royaume, il fallait que je termine mon tour d’horizon des œuvres d’Adrien Tomas se situant dans l’univers du Sixième Royaume. Et c’est pourquoi je vais aborder aujourd’hui

La Maison des mages

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Introduction

 

Avant de commencer, j’aimerais rappeler que vous pouvez retrouver tous les articles concernant un genre, un auteur, ou même une saga grâce aux tags. Cela vous permettra par exemple de retrouver tous les articles que j’ai consacrés aux romans d’Adrien Tomas.

Je vous informe également que le blog dispose d’une page Facebook, que vous pouvez suivre si le cœur vous en dit (j’y organise bientôt un sondage sur les sagas ou gros dossiers que j’aborderai cet été).

Adrien Tomas est un auteur français né en 1986. Il écrit principalement de la Fantasy, et a fait des études d’écologie. Ses romans sont publiés aux éditions Mnémos en grand format et sont également disponibles au format poche dans la collection Hélios des Indés de l’imaginaire, dans le cas de Notre Dame des loups, La Maison des mages et La Geste du Sixième Royaume. Ce dernier a d’ailleurs reçu le prix Imaginales en 2012.

Voici la quatrième de couverture du roman :

« Quand le Bien et le Mal n’existent pas, seuls restent les choix.

Tiul est le plus mauvais étudiant de La Maison des mages, plus intéressé par les filles des tavernes que par l’art qui permet à ses confrères de manipuler les forces de ce monde.

Anthalus est un mercenaire de bas étage qui vit au jour le jour entre tueries et trahisons.

Qiruë, craintive et chétive, est la dernière représentante du peuple moribond et décadent des Elfes, méprisée et haïe par ses supérieurs.

Alishr est un jeune écuyer malingre qui rêve de devenir paladin, malgré les brimades et l’ostracisme dont il est la victime.

Ce ne sont pas des héros, et il est probable qu’ils ne le deviennent jamais.

Pourtant, alors que la mystérieuse Maison des mages, qui apporte aide et éducation aux populations, tisse son réseau tentaculaire au cœur des Six Royaumes, le destin du monde va heurter le leur de plein fouet et les jeter face à des forces magiques aussi anciennes que l’univers.

C’est avec et contre elles qu’ils devront écrire la légende des siècles à venir. »

La Maison des mages est le deuxième roman publié d’Adrien Tomas, paru chez Mnémos en 2013 et repris en poche dans la collection Hélios des Indés de l’Imaginaire en 2014. Il également disponible au format numérique.

Le roman se situe dans l’univers du Sixième Royaume, que l’auteur avait d’abord abordé avec La Geste du Sixième Royaume. Le récit se situe environ trois siècles après ce dernier, et est donc le plus avancé dans la chronologie de cet univers. Cette information peut avoir son importance. Pourquoi ?

Parce que vous pouvez lire La Maison des mages de deux manières différentes. Soit le roman peut constituer votre point d’entrée dans l’univers du Sixième Royaume, et donc il sera celui que vous lirez en premier avant de lire les autres œuvres (ou non, vous êtes libres, après tout, qui suis-je pour vous donner des ordres?). Soit il peut constituer votre lecture finale dans cet univers (en attendant d’autres romans?), après Le Chant des épines et La Geste du Sixième Royaume. J’ai choisi cette dernière option, et croyez-moi, je n’ai pas été déçu du voyage, parce que la lecture des récits précédant La Maison des Mages est extrêmement éclairante sur certains points (notamment pour comprendre les personnages vivant depuis très longtemps).

Mon analyse va porter, comme souvent avec Adrien Tomas, sur l’univers dépeint par l’auteur, puis sur l’ambiguïté des personnages et du récit en lui-même. Notez que je vais faire de mon mieux pour ne rien spoiler… du roman en lui-même. Je risque toutefois de faire quelques renvois aux romans précédents, aussi je vous conseille de faire attention aux spoils de La Geste du Sixième Royaume, entre autres.

L’Analyse

 

Un univers riche, nourri par les conséquences des romans précédents

 

La Maison des mages se déroule des siècles après La Geste du Sixième Royaume, et le lecteur va le ressentir lors de sa lecture. Les événements qui se sont déroulés durant la précédente Guerre des Aspects ont largement impacté le continent, et l’auteur nous le montre plusieurs fois, avec le fait que l’Empire de Seï ne soit plus que l’ombre de lui-même, la fragilisation d’Évondia à cause des rapports tendus entre les tribus des Kharans et les nordiques malgré l’unification trois cent ans plus tôt, l’affaiblissement de la Grande Forêt… Le changement est assez drastique et permet de se rendre compte de l’écart entre les deux romans, en plus de rendre cohérent le lore du Sixième Royaume.

Le changement s’aperçoit également dans les progrès de la science dans le roman. En effet, la Maison des mages, en plus d’avoir appris à maîtriser la magie des Limbes sans utiliser l’hylium (une drogue rituelle renforçant les pouvoirs magiques mais créant une forte dépendance) des Sœurs Grises, parvient à créer des « golems », sortes de créatures mécaniques dans lesquelles sont enfermés des esprits qui obéissent aux « manciens ». Ils ont même créé des « drones », grâce au même principe. On a là des sortes de robots, si je ne m’abuse. On apprend également que les Sœurs Grises (mais cela était déjà assez explicite dans La Geste du Sixième Royaume) font des expérimentations qui donnent des « chimères », des monstres hybrides de plusieurs espèces d’animaux. Enfin, les Nains possèdent une technologie qui se trouve être extrêmement avancée pour un univers de Fantasy a priori médiéval, puisqu’ils possèdent des « mécaptères » (des machines volantes), des armes à feu, et le plus doué d’entre eux est même capable de se cloner et de fabriquer des corps artificiels ! Oui, vous avez bien entendu, La Maison des mages est un roman de Fantasy dans lequel il est question de clonage et de corps artificiel ! Ces éléments de technologie permettent d’ajouter à l’originalité de l’univers d’Adrien Tomas, tout en permettant de traiter des thèmes relatifs à la science-fiction au sein d’un univers de Fantasy.

Je terminerai cette partie en signalant que La Maison des mages fait beaucoup de renvois (implicites ou non) à d’autres romans d’Adrien Tomas, même ceux qui lui sont ultérieurs, comme Le Chant des épines (étaient-ils déjà planifiés à ce moment-là ?), et cela ajoute à la cohérence de l’univers. L’épilogue du roman relie tous ces romans entre eux, d’une certaine façon, mais je ne vous en dirai pas plus.

Une morale et des personnages toujours ambigus

 

Je l’ai déjà dit plusieurs fois, mais je continuerai de le souligner, les romans d’Adrien Tomas ne sont pas manichéens du tout (et La Maison des mages est sans doute le moins manichéen d’entre tous), malgré le fait que l’auteur semble jouer avec nos attentes. Je m’explique.

On pourrait croire de prime abord que le roman va nous faire suivre la pauvre Qiruë dans une quête désespérée, aidée par un mercenaire sans foi ni loi (Anthalus) et par un mage faiblard et égoïste (Tiul) qui cherchent tous deux à la manipuler pour servir leurs intérêts, mais cela va se révéler bien plus complexe, et vous verrez que les manipulateurs ne sont pas toujours là où on les attend, à travers des scènes de jeu intellectuel de haute volée. Ces scènes vous montreront qu’effectivement, « Le Bien et le Mal n’existent pas », parce que chaque personnage cherche à défendre sa propre vision du Bien et est convaincu que ses actions servent le bien, aussi meurtrières soient elles, et il est par conséquent normal que chacun d’entre eux cherche à manipuler et dominer les autres en usant de stratégies plus ou moins retorses et contraires à la morale. Je pense notamment à ce Qiruë fera lorsqu’elle sera en compagnie des Nains, mais je ne vous en dirai pas plus.

Ne vous attendez donc pas à voir des héros au grand cœur (ou alors pas du tout où vous les attendez), parce que les agissements des personnages n’ont souvent rien de moral, puisqu’ils massacrent, tuent, volent et organisent même des génocides sans aucun scrupule. Ces exactions sont commises dans toutes les factions que l’on suit, et l’auteur n’en sauve aucune ou presque. Néanmoins, chaque personnage possède sa propre part de tragique, et croyez-moi, vous aurez parfois du mal à ne pas ressentir d’empathie pour certains d’entre eux.

Il est en effet difficile de ne pas ressentir d’empathie pour les personnages, même ceux qui apparaissent comme étant les plus horribles (je pense notamment à Eldryd), parce qu’ils sont tous complexes et défendent leurs idées et une vision du monde qu’ils pensent positive (rendre l’humanité totalement libre de ses choix dans un monde où la Nature et le Progrès se font littéralement la guerre, ça paraît positif, non?), d’autant plus que certains d’entre eux se sont développés sur des siècles et des siècles, avec les Immortels ou le runique Tildor, par exemple, ce qui leur donne une certaine aura, surtout quand on a lu les romans précédents et qu’on les connaît. À ce titre, j’ai trouvé que l’épilogue (et le roman de manière générale) est vraiment magnifique et nous renseigne sur le destin de personnages qu’on pensait avoir oubliés.

Le mot de la fin

 

Selon moi, La Maison des mages est une énorme réussite. Le roman nous donne à voir un univers en état de crise majeure et des personnages qui font tout pour le sauver, par tous les moyens possibles et imaginables, même les plus horribles et compromettants. Il constitue également le point le plus avancé dans la chronologie de l’univers du Sixième Royaume d’Adrien Tomas, et j’espère vraiment que l’auteur nous donnera une suite.

Cet article (comme celui sur La Geste du Sixième Royaume) auront pu vous sembler incomplets, et je tiens à m’en excuser. Pour ma défense, j’essaie toujours de ne pas spoiler, et il me semblait difficile de ne pas spoiler en effectuant une analyse plus complète. Par conséquent, si vous sentez que ces chroniques sont lacunaires, faites-le moi savoir en commentaire, et cela me donnera peut-être la motivation pour revenir à des articles de fond sur les œuvres d’Adrien Tomas !